Σάββατο 28 Δεκεμβρίου 2019

ΑΝΤΡΕ ΠΙΕΡ ΝΤΕ ΜΑΝΤΙΑΡΓΚ



ANDRÉ PIEYRE DE MANDIARGUES


EVE LUCIFUGE

Elle est massivement présente

Elle est la plus vivante et la plus noire

Au milieu de cette foule consumée

Entre tous ces hommes pauvrement recueillis

Ces femmes sauvages ces enfants mornes

Unis à l'ombre d'un diéâtre froid

Où ils sont venus voir d'autres hommes

Mourir

D'autres femmes d'autres enfants

Mourir encore.

Ses cheveux ont l'éclat de la peau
Ses yeux brillent comme des scarabées
Ses genoux remuent une lave élémentaire
Qui roule sur la peluche cramoisie
L'or éteint les taches de charbon
Le crin bestial jailli hors du fauteuil
Au contact habituel de ses jambes.

Elle sait bien que la salive d'un ver

Gaine jusqu'en haut ses cuisses nues

Et son manteau de faux léopard

Exhale une atmosphère de bouc

Où dansent aussi des mouches roses

Comme à l'entour de la digitale pourpre

Vénéneuse et seule entre les simples de la forêt.

Sa croupe est trop large pour une femelle de

l'homme
Quel bras pourrait la ceindre
Quel poing pourrait l'abattre À quel jeu la plier
Par quel ressort de gomme

Sur quel velours grinçant quelle fourrure musquée
Devant quel miroir blême ?

Quels mots l'apprêteraient enfin aux boues de l'homme ?

Riant elle s'émeut d'une sueur chevaline
Qui dévore de feux sa tunique en viscose
Et son rire est un trophée de boucherie.

Nourrie de cendre elle se sait
Carnivore
L'obscur l'épanouit.


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